OPINION

 

Le makhzen, un rouleau compresseur aveugle

 Baba Sayed

 

Depuis le congédiement de son chef d'orchestre, M. Driss Al-Basri, l'appareil du Makhzen donne l'impression d'être un enragé et furieux éléphant enfermée dans une maison de porcelaine. Conçu, à l'origine, comme une protection d'une monarchie qui avait du mal à se faire accepter par une population digne et pieuse, le Makhzen est à la fois une machine à la fois subtile et violente dont Basri et ses prédécesseurs, Oufkir et Dlimi en particulier, se sont habilement servi comme deus ex machina pour détourner les marocains de la politique et leur inculquer la certitude que celle-ci est le domaine réservé de sa « Majesté ». Depuis l'accession de Mohamed VI au trône, le Makhzen est devenu entre les mains des novices qui ont pris la place de Basri et qui ne paraissent avoir ni son expérience, ni son sang froid ni surtout sa capacité à se fixer les limites au-delà desquelles l'usage de la violence devient contreproductive, un rouleau compresseur, aveugle et incontrôlable, qui casse tout qui pouvait se trouver sur son passage !

Entre les mains du mégalomane Fouad Al-Himma et ses collaborateurs, le Makhzen est devenu une machine folle, apparemment incontrôlable, dont l'objectif est de semer, sans discernement ni distinction, la terreur et la désolation. A défaut de pouvoir satisfaire les revendications légitimes des citoyens (nes) marocaines, leur donner les chances d'une vie digne et décente, les responsables marocains semblent avoir opté, depuis l'arrivée de Mohamed VI au pouvoir, pour une politique de fuite dont l'une des conséquences directe est, semble-t-il, la perte de contrôle par les novices collaborateurs d'Al-Himma de l'infernale machine du Makhzen.

Cette perte de contrôle de l'appareil du Makhzen par les « petits » successeurs de Basri est une donnée incontestable dont nous pouvons vérifier les manifestations tous les jours dans le cadre de la vie intérieure marocaine. Nous retenons trois exemples qui nous paraissent, plus que beaucoup d'autres, l'illustrer de manière évidente : la campagne haineuse menée, tambour battant, depuis les derniers mois contre l'Algérie, l'état de siège imposé par les forces militaires et paramilitaires à nos zones occupées et l'acharnement contre la quarantaine de nos compatriotes détenus, arbitrairement et dans des conditions inhumaines, dans les prisons marocaines. Dans les trois cas, les objectifs visés par l'État marocain ne se sont pas seulement avérés absurdes et irréalisables, ils ont produit, c'est l'évidence même, un effet boomerang dont les conséquences pourraient certainement se révéler néfastes et difficiles à gérer, à court et à moyen terme, pour les dirigeants marocain.

L'Algérie, contrairement aux prévisions d'Al Himma et ses collaborateurs, a refusé de se laisser impression par les foules d'immigrés marocains ameutées devant ses ambassades dans les capitales occidentales par les barbouzes de sa « majesté ». Elle a refusé catégoriquement et avec la dignité et la fierté habituelles de céder aux pressions de ceux qui voulaient lui faire changer - rien de moins !- de politique sur le dossier du Sahara Occidental. Pus grave pour les apprentis sourciers d'Al-Himma, ces formes de pression et de chantage exercées sur elle par les agences occultes du ministère de l'intérieur marocain et qui sont, faut-il le souligner, peu coutumières dans le cadre des rapports que les États entretiennent entre eux, ont renforcé chez les responsables algériens, selon certains observateurs avertis, le sentiment du caractère vain et inutile de la politique de la main tendue qu'ils ont privilégiée jusqu'ici dans leurs relations avec le « voyou » régime marocain.

Dans les zones occupées du Sahara Occidental, la politique de la manière forte pratiquée par les hommes de main d'Al-Himma est en passe de produire le même résultat A travers l'acharnement de l'État marocain contre les défenseurs sahraouis des droits de l'homme, les méthodes d'une rare violence utilisées par l'armée marocaine et les forces du ministère de l'intérieur pour réprimer et combattre, dans les zones occupées du Sahara Occidental, toute forme de manifestation identitaire ou nationaliste, le Makhzen vient de révéler, pour les jeunes générations de sahraouis qui ne le connaissaient pas, sa vraie nature : une machine infernale à semer la terreur et la désolation parmi ceux et celles qui refusent de s'y soumettre. Ce qui ne peut, d'un côté, que pousser les sahraouis des zones occupés qui n'ont plus rien à perdre que leurs chaînes à multiplier, à l'avenir, les manifestation de leur rejet de l'occupation marocaine de leur territoire et renforcer, d'autre côté, la détermination des prisonniers politiques sahraouis dans leur courageuse et héroïque lutte pour obtenir une pleine et entière reconnaissance de leurs droits et une satisfaction de leurs légitimes revendications.

07.11.05


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