OPINION

 

Kofi Annan et le machin

Baba M. Sayed

 

La lecture du dernier rapport que le secrétaire général vient de consacrer à la question du Sahara Occidental, en plus de révéler au grand jour la personnalité de son auteur, est réellement alarmant.

En se posant en héritier légitime de Machiavel, Kofi Annan vient de jeter les masques et de montrer qu'il pourrait peut-être assumer d'autres tâches, remplir d'autres fonctions, sauf celle d'être l'honorable secrétaire d'une indispensable organisation internationale en temps troubles chargée de dire et d'appliquer le droit et la justice. Faisant preuve de démission devant une « réalité » qu'il ne pourrait, laisse-t-il entendre, changer, Kofi Annan se contente d'inviter les Sahraouis (le maillon faible) à lever le drapeau blanc, à renoncer au fruit de leur combat et à accepter ce que le Maroc (soutenue par la France) n'a cessé d'exiger d'eux, depuis les dernières décennies, devenir les « sujets » de sa « Majesté ».

Pour justifier sa sollicitude à l'égard du Royaume du Maroc et de son puissant mentor, le secrétaire général n'hésite pas à recourir à une approche cynique qui laisse supposer que le champ des relations internationales ne peut être qu'un champ clos de rivalités où le plus fort et le plus puissant gagne à tous les coups. Une logique qui parce qu'elle a nourri et suscité, dans un passé récent de l'humanité, toutes guerres de destruction qui ont dévasté le monde, ne peut, si elle est remise à l'honneur que, en même temps de déshonorer les Nations unies et leur patron, projeter la planète dans des lendemains inconnus.

Adepte, apparemment, de la logique « seule force crée le droit », pour kofi Annan le conflit du Sahara Occidental ne peut plus sortir de l'impasse où il se trouve depuis des années que si l'autre partie, le F. Polisario (l'autre partie prenante, faible, du conflit) accepte les conditions du Maroc. Du moment où le conflit, à suivre le raisonnement de Aann, n'intéresse pas les grands de ce monde, et que le Maroc, épaulé par la France, ne veut jamais accepter la possibilité de l'organisation d'un référendum d'autodétermination sur le territoire du Sahara Occidental, donc une indépendance éventuelle de l'ancienne colonie espagnole, il ne reste aux Sahraouis que de faire contre mauvaise fortune bon cœur et accepter ce que le Royaume du Maroc et son roi (sous la houlette de la France et de son président) veulent bien leur offrir, c'est-à-dire la défaite et l'indignité dans le cadre de négociations !!

A étudier avec attention les comptes-rendus qui en ont été faits, on croit lire non pas le rapport d'un secrétaire général des Nations unies chargé de faire respecter partout où ils sont malmenés, la justice et le droit, mais le manuel implacable d'un fossoyeur cynique, des temps lointains, qui pour ne pas démériter de ses supérieurs, n'hésite pas à jeter, sans états d'âme, dans la fosse toutes les victimes qu'on voudrait bien lui désigner comme telles.

Sans panache et sans dignité, le secrétaire général des Nations unies se montre dans la rédaction de son rapport- rançon de la célébrité ?- un monstre froid qui n'affectionne, dans le cadre de sa gestion des affaires de la communauté internationale, qu'une forme de réalisme froid que l'on pourrait qualifier de démissionnaire qui lui permet &endash;calcul prémédité ?- tout en maintenant, sans vagues, son « job » de ne pas « effaroucher » les grands de ce monde, et de ne pas désespérer, en prenant le parti du Maroc et de la France, de recevoir, peut-être le jour de sa retraite, comme bien d'autres avant lui, les récompenses qu'il est en droit d'attendre ...

De la Palestine au Sahara Occidental, en passant par l'Afghanistan et l'Irak, l'on peut dire, sans risque de se tromper, que « le machin » n'a jamais autant mérité son nom que sous Kofi Annan…

L'équipe sahraouie chargée des relations avec la Mission des Nations unies pour un référendum au Sahara Occidental (MINURSO) a-t-elle des moyens pour faire face à la nouvelle désespérante situation par le rapport du secrétaire général ? ou va-t-elle se contenter de méditer, impuissante et la mort dans l'âme, les dégâts ?

C'est le moment de le faire savoir.

24.04.06


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