OPINION

 

Etaient-elles vraiment gênantes mes questions ?

Mohamed Bennou
réfugié politique sahraoui en Suisse

 

A tous mes compatriotes et mes amis qui ont mal entendu, mal compris ou mal interprété mes questions.
A tous ceux parmi eux qui m'ont bombardé par leurs critiques infondées.
Et à tous ceux qui ont décidé, de leur propre chef, de rompre toutes sortes de contacts à cause de mes questions !!!

Après le grand succès de la manifestation pour l'autodétermination du peuple sahraoui, l'application des résolutions de l'ONU, et la libération de tous les disparus et prisonniers d'opinion sahraouis, le rendez-vous était au Centre International de Conférences de Genève, où la conférence : Paix et respect des Droits Humains au Sahara Occidental, animée par M. Mohamed Sidati ministre délégué de la RASD et plusieurs membres d'organisations non gouvernementales, devait avoir lieu. L'ambiance était joyeuse, les Marocains avaient été « chassés » par la police genevoise de la Place des Nations à cause de leur comportement irresponsable et illégal/e qui consistait à voiler la manifestation des Sahraouis et leurs sympathisants par une pseudo-manifestation pro-marocaine qui n'avait pas été autorisée par les autorités de Genève. L'élément le plus signifiant, dont tout le monde parle, est le drapeau marocain qui avait été brûlé par les manifestants sahraouis. Un acte qui n'avait pas été prévu, merci donc aux services secrets marocains de nous avoir appris comment manifester correctement !

Dans un climat familial, la conférence a eu lieu. Les interventions étaient si longues que le public venant de loin avait sommeil ! Quand à moi, mon seul souci était de poser quelques questions qui me dérangent au débat prévu à la fin de la conférence. Malgré que le temps limité ait été largement dépassé, le modérateur a pris l'initiative que s'il y a de brèves questions destinées à une personne précise, elles/ils pouvaient être posées. C'était bel et bien l'occasion de j'attendais :

« J'ai deux questions. La première est liée au plan Baker II, et elle est adressée au ministre conseiller de la RASD : M. le ministre, nul ne peut nier que la RASD est le plus grand acquis du peuple sahraoui, un acquis qui concrétise sa volonté de construire un Etat démocratique sur son territoire national libre et indépendant. En acceptant le plan Baker II, le Front Polisario accepte la substitution de cette entité nationale (la RASD) par ce que Baker appelait : l'autorité du Sahara Occidental. Quelles sont les mesures concrètes prises par le Front Polisario pour que la RASD conserve son siège au sein de l'Union Africaine, et pour qu'elle maintienne ses relations diplomatiques sur la scène internationale ?

La deuxième question, concerne les violations des Droits de l'Homme aux campements de réfugiés. Comme tout le monde le sait, des flagrantes violations des droits humains ont été perpétrées par le Front Polisario dans le passé, plus précisément entre 1976 et 1990. Ces violations concernent des arrestations arbitraires, des disparitions forcées, la torture et des exécutions sommaires. Et comme tout le monde le sait encore, les pays voisins du Sahara Occidental (le Maroc et l'Algérie) ont commencé, chacun à sa manière, des processus de réconciliation nationale pour résoudre des problème similaires. Comment le gouvernement de la RASD gère-t-il ce dossier douloureux, et quelle est la position des ONG présentes par rapport à ce dossier ? »

En posant ces deux questions, je n'avais aucune intention autre que de savoir, d'abord quelles sont les garanties qui ont poussé le Front Polisario à accepter le plan Baker II ? Et quel est le destin de la RASD pendant et après la période transitoire ? Et puisque la conférence traite aussi de la situation des Droit de l'Homme au Sahara Occidental, j'aimerais bien savoir comment le gouvernement sahraoui gère le dossier des flagrantes violations dans le passé, et si une réconciliation nationale est à l'ordre du jour ?

Que les conférenciers répondent ou non à mes questions, qu'ils disent la vérité ou non, ce n'est pas ça qui m'a poussé à écrire ces quelques lignes. Ce qui m'a frappé c'est le comportement de certains compatriotes qui m'ont bombardé de critiques infondées et qui m'ont mis sur un pied d'égalité avec les transfuges en qualifiant mes propos de pro-marocains D'autres ont choisi la rupture, ils ont tort, mais je respecte leur choix quand même !

Aux uns et aux autres, j'aimerais dire que le statu quo ne justifie en aucun cas une telle régression qui réduit à néant notre entité nationale acquise par le sang, la souffrance et les larmes. Face aux critiques des uns et au silence des autres, j'aimerais exprimer ma conviction que c'est dans l'intérêt et du Front Polisario et du peuple sahraoui qu'une solution juste et définitive soit trouvée le plus tôt possible au problème des violations des droit humains dans le passé. Et à mon avis, le tabou sur les problème des abus perpétrés par certains dirigents Sahraouis devrait être levé avant l'indépendance car c'est un " dossier empoisonné" avec lequel les citoyens des territoires occupées n'ont rien à voir ...

Quelles soient gênantes ou non, et tant qu'il n'y a pas de réponses satisfaisantes, je continuerai à poser mes question !

Le 25 avril 2004


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